Institut interfacultaire au sein d’une université bilingue, le CSIS œuvre dans un espace de discours interdisciplinaires, ce qui lui permet d’engager des perspectives issues de diverses disciplines sur l’objet d’étude que représente l’islam. Dans cet espace, une attention particulière est apportée à l’imbrication des approches autoréflexives islamiques et des approches des sciences humaines et sociales. Sur le plan méthodologique – selon la question de recherche et le projet concerné – différentes méthodes des sciences humaines et sociales sont mobilisées, comme par exemple les analyses de textes contextualisantes et les recherches empiriques de terrain. Un échange interdisciplinaire avec des disciplines voisines se trouve dès lors favorisé et il présuppose l’autonomie des Études islamo-théologiques. Ainsi, l’institut contribue également à clarifier la question de savoir comment la nouvelle discipline des Études islamo-théologiques peut être configurée concrètement dans le contexte européen et exploitée en Suisse.

Parmi le large éventail des recherches possibles, le CSIS se concentre sur des questions pertinentes pour les enjeux autour de l’islam dans les sociétés contemporaines. Parce que de telles questions de recherche touchent en général plusieurs sous-disciplines des Études islamo-théologiques, le CSIS travaille avec une classification scientifique courante distinguant la recherche historique, systématique et pratique, ces deux dernières se voyant conférer un statut prioritaire. La recherche systématique se caractérise par une étude approfondie des connaissances islamiques qui sont discutées et développées en interaction avec les connaissances scientifiques actuelles. La recherche pratique prend pour point de départ les réalités de vie et les expériences concrètes des musulmanes et des musulmans et étudie, en intégrant des approches empiriques, les champs d’action sociaux et les interactions sociales, qui sont à leur tour réintégrés dans les théories.

Le CSIS poursuit une approche participative qui ne considère pas les différent∙e∙s actrices et acteurs ainsi que les parties prenantes dans le domaine de l’islam et de la société comme des objets de recherche. Bien plutôt, l’approche participative les valorise en tant que sujets. Ceux-ci n’apparaissent pas seulement sur le terrain en tant que partenaires d’interviews, mais ils et elles participent également au développement de l’objet de la recherche dans le cadre de différents projets et sont impliqué∙e∙s en tant que partenaires dans le transfert des connaissances. Cela signifie, entre autres, qu’une importance est accordée aux analyses des besoins, à l’établissement de formats d’échanges dynamiques et à la prise en compte des perspectives pratiques. Ainsi, divers∙e∙s actrices et acteurs musulmans disposent d’un espace pour se positionner eux-mêmes, ce qui est réfléchi et intégré de manière scientifique. L’approche participative favorise une base grâce à laquelle les résultats de la recherche peuvent être largement reçus et avoir un impact sur la société.

Dans ce pôle de recherche, il s’agit de s’interroger sur la manière dont le savoir religieux est produit, légitimité et transmis. On analyse entre autres la façon dont les exigences idéologiques se traduisent dans le discours et l'action islamiques, dont elles sont négociées, à quel moment tel thème est traité et le poids qu'ont les différentes personnes (groupes)  dans la formation de l'opinion. Les modèles de recherche en sciences sociales sur l’établissement de l’autorité, par exemple par la fonction, la compétence et l’intégrité sociale, font ici partie de l'éventail des approches scientifiques mobilisées au même titre que les réflexions théologiques sur la forme de la révélation islamique, la prophétie et les références historiques à une tradition religieuse. Le CSIS développe une approche discursive figurant comme interface entre les différentes propositions et modèles de revendications idéologiques ; engageant ainsi à un dialogue de négociation entre différents points de vue et contextes. 

La recherche en éthique sociale s'interroge sur l'organisation structurelle d'une cohabitation bonne et juste dans les conditions du pluralisme et de la (post-)sécularité. Les ressources religieuses et leur potentiel pour le bien-être, les droits de l'homme, la transformation des conflits et l'éthique de la paix sont également discutées. Dans ce cadre, le travail social, l'accompagnement spirituel et l'éducation religieuse constituent les champs de recherche prépondérants. La manière dont les organisations et les individus musulmans fournissent des prestations d'utilité publique et les motivations qui les poussent à le faire, ainsi que les liens avec les structures d'aide sociale existantes, font l'objet de recherches dans le domaine du travail social. Quant à l'aumônerie, il s’agit par exemple de réfléchir à la manière dont l'aumônerie musulmane, née d'un besoin pratique, peut introduire dans le cadre d'institutions séculières des offres de sens religieux dans l'accompagnement psychosocial et quels nouveaux concepts peuvent être développés pour leur fondement et leur pratique. Dans le domaine de l’éducation religieuse, la visée par exemple d’éclairer comment les conceptions traditionnelles de l'enseignement et de l'apprentissage et la pédagogie religieuse moderne peuvent être mises en relation et comment les contenus religieux peuvent offrir une orientation dans le contexte de la Suisse en tenant compte de la réalité et des besoins locaux.

La réalité concrète de la vie des musulmanes et des musulmans en Suisse occupe une place particulière en tant que thème de recherche. En font partie les aspects de l'identité religieuse, de la vie communautaire et de la pratique religieuse dans le contexte d'une société post-migratoire. Ils s'inscrivent dans un cadre de discours sociétaux qui soulève des questions sur la gestion de la politique religieuse, la reconnaissance en droit public, la radicalisation et la prévention ainsi que la qualification des imams et des personnes chargées de l'encadrement religieux. En partant de la diversité des expériences des musulmanes et des musulmans, la recherche sur les interprétations religieuses du monde et les positionnements personnels – par exemple au sujet du rapport à une autorité religieuse se reflétant concrètement sur le terrain ou de la manière suivant laquelle l'aumônerie est mise en œuvre – sont rendus visibles, fait l'objet d'une réflexion académique et d'un retour théorique. Le CSIS ouvre ainsi un espace d’articulation et de classification des multiples interprétations du monde et de réalités de la vie religieuse et c’est ainsi qu’il accompagne les débats de société.