Journée d'étude - 30 novembre 2018Publié le 20.11.2018

Jean-Marc Lovay. "Laisser parler les monstres minoritaires"


L’oeuvre de Lovay, des Régions céréalières (1976) à Chute d’un bourdon (2012), appartient à ces confins de la littérature qui mettent les lecteurs à l’épreuve. La compacité des pages, les phrases à emboîtements multiples, l’univers romanesque déroutant constituent autant de seuils intimidants pour celui qui y pénètre. Pourtant, ce dépaysement littéraire offre, par sa radicalité même, une expérience de lecture d’une rare intensité. 

Depuis plus de quarante ans, Lovay n’a pas cessé de renouveler la « manière » très personnelle qui l’avait signalé, dès ses premiers récits, comme un des écrivains les plus singuliers de sa génération. Associés un temps à la vogue des « aventures d’une écriture », ses textes révèlent aujourd’hui des enjeux plus inattendus. Revenir à Lovay, c’est en effet reprendre à neuf les caractéristiques qui définissent ce que Deleuze et Guattari ont appelé une « littérature mineure » : l’instauration d’un « rapport minoritaire » à la langue dominante ; une façon de donner voix à ceux qui échappent à nos rationalités hiérarchisantes (bêtes, enfants, fous, solitaires) ; une subversion continue par l’humour des bienséances romanesques. C’est reconnaître aussi, parallèlement à sa virtuosité formelle, une écriture qui maintient le contact avec le « hors-texte » dans son attention quasi « cosmique » à la nature, par sa pratique de genres non fictionnels (le journal intime) et « transmédiaux » (les textes radiophoniques), par les échos qu’y font retentir les courants libertaires et le « lâchez-tout » rimbaldien. 

Cette journée d’étude cherchera ainsi à déplier les dimensions d’une oeuvre à la richesse sans doute trop méconnue. À cette fin, il s’agira de faire appel à des chercheurs et à des créateurs d’horizons différents, afin de revivifier l’appel lovaysien à se déprendre de nos savoir-lire.