• Abbes Makram

Qu’elle soit ramenée à la morale ou fondée juridiquement, la tolérance apparaît comme une donnée fondamentale pour réfléchir aussi bien sur les questions de l’identité et de l’altérité que sur celles des droits de l’homme et de la démocratie. À l’articulation de la morale, de la politique et du droit, cette notion est souvent convoquée pour aborder le pluralisme religieux, l’universalisation des normes et des valeurs ou le respect des différences culturelles. Toutefois, cet intérêt est parfois accompagné d’une critique renvoyant à l’ambiguïté ou à l’inconsistance de cette notion. La question des limites de la tolérance souligne cette fragilité : s’il est admis que l’intolérance est la négation de la tolérance, l’excès de celle-ci pourrait-il être également jugé comme intolérable ? Les débats philosophiques contemporains tentent de résoudre ces difficultés en explorant les interrogations suivantes : une société démocratique peut-elle ou doit- elle tolérer certains réflexes communautaires ? Quelles sont les limites de l’acceptation des particularismes culturels ? Doivent-ils être cantonnés dans l’ordre du privé ou sont-ils susceptibles d’être reconnus juridiquement ? De telles interrogations seront conduite dans le cadre d’une réflexion approfondie sur le rapport entre la religion islamique et cette notion importante. L’analyse de certains corpus (Coran, dits du Prophète, exégèse, traditions juridiques) viendra éclairer la nature de cette articulation, et donner les bases d’une approche critique et scientifique du sujet. Parallèlement, le cours se concentrera sur les expériences civilisationnelles de l’islam classique et moderne afin de montrer la présence ou l’absence des pratiques de tolérance selon les époques et les sociétés étudiées.

1. Comprendre la notion de tolérance aussi bien dans le champ de la pensée morale et religieuse occidentale, que du point de vue de sa constitution dans la pensée islamique.
2. Se doter des compétences méthodologiques nécessaires pour comprendre les discours de ceux qui soutiennent que la tolérance ne peut avoir lieu en islam, et de ceux qui avancent que l’islam est foncièrement tolérant.
3. Réfléchir sur la notion sous l’angle de la religion, de la morale, de la politique et du droit, afin d’en étudier toutes les facettes.
4. Articuler l’analyse de la notion à la compréhension d’autres dossiers comme la criminalisation de l’apostasie dans certains pays musulmans ou la propagation de discours de haine théologique, et étudier la violence qu’elles secrètent et les attitudes négatives qu’elle génèrent.

Ce cours sera dispensé en ligne uniquement

Abbès, Makram, « La question de la tolérance en Occident et en Islam à travers le livre d’Yves- Charles Zarka et de Cynthia Fleury : Difficile tolérance », Astérion, N°3, septembre 2005, p. 325-375.

Abou El Fadl Khaled (Ed), The Place of Tolerance in Islam, Beacon Press, 2002.

Emon, Anver, 2012, “Religious minorities and Islamic law: Accomodation and the limits of tolerance”, in A.M. Emon, M. Ellis & B. Glahn (eds.), Islamic law and international human rights law, pp. 323–343, Oxford University Press, Oxford.

Friedmann, Yohanan, Tolerance and coercion in Islam. Interfaith relations in the Muslim tradition, Cambridge, Cambridge University Press, 2003.